Harcèlement sexuel : “l’éternel combat des médias”
30 minutes avant le lancement, on ne trouvait plus de place libre : la rencontre/débat autour des «Médias face au harcèlement», a été des plus prisés par les visiteurs de la deuxième édition du Festival Médias en Seine.
“Une boule de feu qui traverse la société.” Tenaces, le harcèlement sexuel et le sexisme dans les médias sont un phénomène d’ampleur qui peine à disparaître. Mais depuis les révolutionnaires campagnes #MeToo et #BalanceTonPorc, le combat contre le harcèlement et pour l’égalité avance. C’est le thème débattu mardi dernier au Festival Médias en Seine sous le thème : « Les Médias face au harcèlement : les leçons de la révolution #METOO ».
En France comme partout dans le monde, la journaliste et présidente de l’association Prenons la Une Léa Lejeune, explique que les femmes sont de plus en plus déterminées à en finir avec. A la tête d’une association qui défend les droits, le métier et la sécurité des femmes journalistes, la militante avance que cette réalité n’est pas propre à la France; mais qu’elle gangrène toutes les sociétés, orientales et occidentales. Les femmes journalistes et employées des médias, souffrent de harcèlement sexuel, de sexisme ou des deux à la fois.
Léa Lejeune précise que l’engagement des médias, face au harcèlement s’est bien réveillé. “Les médias français marquent un an de retard dans le combat. Mais cette année, ils ont eu le mérite très fort de donner la parole à toutes des femmes victimes de harcèlement et sexisme au sein des rédactions”, explique-t-elle. Et de préciser que plusieurs sanctions et pas moins de douze licenciements ont été enregistrés dans le secteur depuis le début de l’année pour cause de harcèlement, sexisme et violence contre les femmes. Ce qui reflète “une réelle prise de conscience de ce qui se passe à l’intérieur des rédactions”. Léa Lejeune relève toutefois avant de finir que les sanctions doivent être données par les rédactions. “Il faut qu’elles soient mesurées et pensées”, ajoute la journaliste.
Une partie de la rencontre-débat a été animée par la polonaise Zuzanna Ziomeck, fondatrice de NewsMavens (un réseau journalistique polonais composé exclusivement de femmes). Son intervention permet de donner une approche plus générale sur l’avancement du combat en Europe. Selon cette dernière, le réseau des médias, en Pologne en particulier, se voit de plus en plus géré par des femmes. Une nouveauté qui aide beaucoup rédactions polonaises à assurer la sécurité et l’égalité de leurs employées.
Par ailleurs, le débat a aussi eu recours au point de vue masculin sur la question à travers l’intervention de l’historien et écrivain Ivan Jablonka, auteur de Des hommes justes – Du patriarcat aux nouvelles masculinités. On retrace les rapports entre les hommes et les femmes, deux ans après #MeToo et plaide la redéfinition du masculin, pour un monde meilleur, occupé par des hommes plus justes et des femmes plus libres.
À travers son œuvre qui lui a pris plusieurs années de réflexions, Ivan Jablonka conclut que “le harcèlement sexuel est endémique là où le pouvoir s’exerce”. L’auteur met en cause “la domination masculine sans vouloir en aucun cas dénoncer les hommes en général”, explique-t-il. Et d’ajouter que pour lui, le harcèlement englobe toute directive qui a pour volonté d’humilier et de porter atteinte à la dignité de la femme : un contact indirect comme l’instauration de climat sexiste dans les rédactions, des campagnes de haine sur les réseaux qui visent les bloggeuses, journalistes et influenceurs.
SOLUTIONS ?
Le thème ayant séduit plusieurs dizaines de visiteurs, le forum E de la maison de la Radio n’a pas suffi pour accueillir tout l’auditoire. Parmi le public, de jeunes futures journalistes se disent “apeurées” par l’autre réalité de leur métier de rêve. “Devenir journaliste est un rêve auquel je tiens depuis toute petite. Entendre aujourd’hui que les femmes journalistes sont victimes de harcèlement sexuel et/ou sexisme dans les rédactions me fait peur”, confie Illona, une étudiante de 24 ans. D’autres plus optimistes sont rassurés par la détermination des associations et ONG pour une meilleure prise en conscience et protection des femmes journalistes. D’ailleurs, plusieurs pistes de solutions sont mises en débat avant de le conclure. Les intervenants proposent entre-autres d’établir un cahier de doléances à remettre à toutes les rédactions, de toucher au porte-monnaie des responsables des médias, de mettre en place un référent à l’égalité dans les rédactions pour écouter les difficultés des femmes, et d’afficher les sanctions à la vue de tous les employés du média et de les sensibiliser…