Par Aurélie Clément et Jessie Nganga

 

Le jeudi 7 septembre 2017, Envoyé Spécial a diffusé « Hôpital public, la loi du marché » sur France 2. Cette enquête édifiante dénonce les restrictions budgétaires et les nouvelles méthodes de gestion appliquées dans les établissements de santé. Julie Pichot, la journaliste à l’origine de ce reportage, nous en dévoile les coulisses et nous parle de son métier. Rencontre.

« Un boulot de petite fourmi »

C’est en février 2017 qu’elle commence à enquêter pour son reportage. Tout est partie d’un constat : le taux de suicide des professionnels de santé augmente, « l’hôpital public va mal ». Puis l’envie de creuser, de comprendre pourquoi. Il aura donc fallu cinq mois à la journaliste pour boucler son reportage : « je ne pensais pas que c’était aussi fermé car il y a plein d’hôpitaux en France, je pensais trouver des gens pour parler mais ça a été très compliqué ».  Elle nous a expliqué qu’il n’y avait selon elle « pas de méthode » pour réussir à obtenir des témoignages mais a souligné l’importance de créer un lien de confiance, de rassurer les gens et d’être honnête. Elle a insisté sur la rigueur dont doivent faire part les journalistes « chaque image doit pouvoir être prouvée par un document, nous devons nous assurer de la véracité des faits, être béton ! ».

Son enquête sur le management et la souffrance à l’hôpital public a dernièrement contribué au débat de l’Assemblée. Et pour la journaliste, c’est là tout l’intérêt du journalisme et de l’enquête. Pouvoir révéler des problèmes dont les institutions et le public n’ont pas conscience –ou ne veulent pas voir. Ce « boulot de petite fourmi » prend du temps confie-t-elle.

Un métier précaire

Mais alors pourquoi avoir choisi cette voie ? « Je me disais que j’allais pouvoir rencontrer des gens, des univers différents et ça c’est génial », explique Julie Pichot. Par amour du terrain mais aussi de l’image, elle décide donc de se spécialiser en télévision. « En presse et en radio, j’ai vite compris qu’on allait de moins en moins vers le terrain, poursuit-elle, Et en journalisme télé on a l’obligation d’avoir des images. »

Mais comme dans les autres médias, ces journalistes sont confrontés à des difficultés. Et la précarité du métier est la plus grande. Pour la journaliste, si l’on veut continuer à avoir des reportages de qualité – issus d’un travail d’enquête conséquent en amont – « Il va falloir trouver de nouvelles manières de fonctionner pour que les journalistes fassent leur travail de manière moins précaire. L’enquête prend du temps et c’est mal payé ».

« Toujours faire ses preuves »

La passion pour l’enquête, l’information, c’est ce qui motive Julie Pichot. Même s’il y a des moments de doute, comme elle l’avoue. « Si tu veux être payé pour les heures que tu fais, il ne faut pas être journaliste ». Cependant, il faut garder espoir, croire que cette situation de précarité va changer, car les journalistes sont une partie de la démocratie.

Le journalisme est un métier dur. « Il faut toujours faire ses preuves et tout le temps se remettre en question ». A la fin de la rencontre, la journaliste donne un conseil aux futurs journalistes : « Pratiquer, n’ayez pas peur de faire des choses. Il faut démarcher les rédactions, les boîtes de production, faire des stages pour se créer un réseau ».