La « prime Covid » annoncée en août par le gouvernement devait être accordée par les départements aux aides à domicile. Or, la prime est inégalement distribuée selon les départements et n’est pas donnée aux aides à domicile employées sans intermédiaires. Pourtant, elles sont au cœur de la vie des familles. Leur importance a été d’autant plus prépondérante durant la pandémie. Dans l’attente de la loi sur le « Grand âge et autonomie » qui légiférera sur le statut des aides à domicile, c ’est l’occasion de revenir sur leur rôle majeur. 

Pas de prime Covid pour tout le monde 

Le Président Macron avait annoncé début août une « prime Covid » versée par les départements aux aides à domicile (97 % de femmes). Pourtant, le versement doit être fait par les départements, il varie donc en fonction de ceux-ci. Les départements du Loire et du Jura n’ont pas versé de prime. Les primes ne sont pas versées aux aides à domicile qui travaillent en CESU (Chèque Emploi Service Universel), directement auprès de l’employeur. Elles sont employées par les personnes qu’elles accompagnent, sans intermédiaire (entre 4 et 10 employeurs en moyenne).

La loi Ségur (adoptée le 8 décembre 2020) pour les hôpitaux a augmenté le salaire pour certains personnels hospitaliers. Les aides à domicile n’ont pas eu de mesure similaire.  Pour le député des Bouches du Rhône Pierre Dharréville (Parti communiste français) « On aurait pu imaginer que des mesures spécifiques soient prises à leur endroit, ça aurait été tout à fait légitime.(…) Ce n’est pas défendable que les aides à domicile soient exclues ».

« La baisse de moral des personnes qu’on accompagne nous a demandé encore plus d’énergie »

Depuis le début de la pandémie de Covid-19 les aides à domicile n’ont pas eu d’augmentation de leur salaire, mais elles ont dû redoubler d’énergie et de faculté d’adaptation. « Certaines personnes âgées étaient dans la crainte de contracter le Covid, et d’autres dans la tristesse d’être seules » raconte Laura (le prénom a été modifié). « La baisse de moral des personnes qu’on accompagne nous a demandé encore plus d’énergie », explique Bénédicte, aide à domicile depuis six ans à La Baule-Escoublac, en Loire Atlantique. Les aides à domicile se sont adaptées aux gestes barrières plus que jamais indispensables dans leur profession. Elles ont dû parfois changer leur pratique. « Certains foyers logements n’acceptaient plus les auxiliaires de vie à l’intérieur des chambres, donc au lieu de lui faire des bains de pied ou faire des jeux, je devais rester dans le couloir et je parlais avec le monsieur » raconte Laura. Elles ont dû redoubler d’inventivité dans un métier où l’humanité est au centre.

 « C’est devenu une vocation pour moi »

Faire le ménage, réchauffer un repas, faire des massages, des bains de pied, des jeux, des courses et des promenades. Au-delà de toutes ces tâches, les aides à domicile sont les premières personnes à être vigilantes sur la santé physique et psychique des personnes qu’elles accompagnent. « Je dois parfois insister auprès de l’entourage pour qu’ils appellent le médecin » explique Bénédicte. Elles sont souvent un pilier en cas de crise. « Quand une des femmes que j’accompagnais est tombée et a agonisé, sa famille m’a appelée. C’est moi qui ai parlé aux secours, et  lorsqu’elle est décédée, j’ai appelé les pompes funèbres, trié et donné ses vêtements. » Sabine auxiliaire à La Baule-Escoublac depuis 9 ans et demi confie « C’est devenu une vocation pour moi ».

Un statut particulier 

« Ça paie mieux et on est plus libres dans notre organisation » affirme Bénédicte. Le fait qu’elle soient employées par l’employeur sans intermédiaire leur permet plus d’indépendance. Elles fixent elles-mêmes leurs tarifs (environ 15 euros nets de l’heure, congés payés compris) et peuvent gérer leur emploi du temps comme elles l’entendent. Pourtant, il y a un revers de la médaille. Le fait d’être seules face à l’employeur rend parfois la défense de leurs droits plus compliquée. Bénédicte aimerait mettre en place des contrats mais « ne sait pas trop comment faire ».  Lorsqu’il s’agit de demander des indemnités légales, elle « n’ose pas toujours ».  

« Notre responsabilité est énorme »

Pour Pierre Dharéville « Nous leur confions ce que nous avons de plus cher : celles et ceux que nous aimons. Il faut que ce soient des métiers véritablement reconnus. » Le gouvernement devrait présenter le projet de loi sur le « Grand âge et autonomie » en 2021. Le projet de loi est présenté comme  « la grande réforme sociale de cette fin de quinquennat » par le Ministre des Solidarités et de la Santé Olivier Véran. Un des objectifs serait d’augmenter les financements pour permettre une meilleure autonomie des personnes âgées. Pour le député Pierre Dharréville, l’absence de mesures spéciales n’est pas un « bon signal ». Sabine a conscience de l’importance de son travail : « Si on n’est pas là, la personne ne peut pas se lever et commencer sa journée. Notre responsabilité est énorme. »